Paroisses, communautés et seigneuries autour de Saint-Geniez-d'Olt-et-d'Aubrac

Atlas du Rouergue

Écrit par Jean-Yves Bou et publié le 10 Oct 2018

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Article tiré de la conférence donnée lors des Journées Généalogiques organisées par le Cercle Généalogique de l'Aveyron le 9 septembre 2018 à Saint-Geniez.

Informations tirées de l'Atlas du Rouergue à la veille de la Révolution française, à compléter par la lecture du volume II Le Dictionnaire.

Le réseau des paroisses autour de Saint-Geniez

Rappelons brièvement que les territoires paroissiaux se sont formés très progressivement au cours du Moyen Âge entre le XIe et le XIIIe siècle, par accord entre les prieurs des paroisses voisines, c'est-à-dire les prêtres qui percevaient des droits paroissiaux, en particulier la dîme.

La carte suivante montre les prieurs des paroisses des alentours de Saint-Geniez : en mauve les paroisses dont les prieurs étaient les curés eux-mêmes, généralement choisis par l'évêque de Rodez ; en rose les paroisses pour lesquelles le prieur était différent du curé, généralement tous deux désignés par l'évêque. Ils pouvaient se partager la dîme, selon une quotité définie (moitié / moitié, deux tiers / un tiers), ou le prieur versait une pension en nature ou une comme d'argent au curé.

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Les autres couleurs désignent d'autres bénéficiaires de la dîme : l'évêque, le chapitre de la cathédrale de Rodez, les moines bénédictins de Conques, de Saint-Victor-de-Marseille, de la Chaise-Dieu, de Saint-Chaffre du Monastier, les cisterciens de Bonneval, les moines d'Aubrac (en marron, très présents), etc.

Peu de sources permettent de tracer précisément ces anciennes limites paroissiales. La plupart sont des parchemins médiévaux non publiés. Donc mes propositions sont hypothétiques, avec une marge plus ou moins grande d'erreur selon les lieux.

La carte des paroisses aux alentours de Saint-Geniez montre la limite entre le diocèse de Rodez et celui de Mende, qui correspond à la limite du Rouergue et du Gévaudan, à l'exception du cas d'Estables, paroisse du diocèse de Mende, à cheval sur Rouergue et Gévaudan.

On constate un découpage en grandes paroisses relativement cohérentes par rapport à d'autres régions du Rouergue, la plus grande étant celle de Saint-Chély, du coup divisée en trois parties appelées "fours". Avec quelques paroisses plus petites comme La Fage.

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On remarque les paroisses laniérées des contreforts de l'Aubrac, en particulier celles de l'ancienne commune d'Aurelle-Verlac, liées aux "boraldes", profondes vallées séparant des plateaux. Autre caractéristique de cette région, tant dans la vallée, que dans le Val-de-Serre, un habitat assez concentré en gros villages, voire bourgs importants, et peu d'églises "champêtres", c'est-à-dire isolées dans la campagne, et desservant un habitat très dispersé.

Communautés et seigneuries

Je rappelle que les territoires des communautés ont été définis aux XIVe-XVe siècles, en partie à partir des seigneuries, qui se sont elles-même territorialisées un peu plus tôt (XIIIe-XIVe siècles). Les communautés d'Ancien Régime étaient donc liées aux seigneuries dite hautes justicières, mais les discordances étaient assez nombreuses. D'où mon projet d'un troisième volume de l'Atlas du Rouergue, précisant la géographie des seigneuries à la veille de la Révolution (parution en 2021). Ces discordances sont en partie liées au fait que les seigneuries étaient susceptibles d'être partagées, démembrées, vendues, etc, alors que les communautés étaient plus stables.

La carte que je propose est celle des seigneuries à la veille de la Révolution française, élaborée à partir de l'enquête épiscopale de 1771 et des déclarations de revenu des seigneurs laïcs (1783-1786, C 1598-1613). Elle amène à quelques remarques :

Forte présence du roi, seigneur de deux des "quatre chatellenies du Rouergue", Saint-Geniez et La Roque-Valzergues. Ces deux seigneuries étaient subdivisées en "membres", qui formaient des communautés différentes dont le roi était seigneur haut, moyen et bas justicier, à l'exception de Pierrefiche où l'abbé de Bonneval exerçait les basse et moyenne justices.

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La grande seigneurie d'Aurelle était également divisée en plusieurs membres. Elle fut acquise par Gilles de Layrolle, viguier de Sévérac, transmise à Pierre Jean Layrolle, président à la cour des Aides de Montpellier, habitant Marvejols. Enclavé dans son territoire, le cas singulier du Bournhou étudié dans l'article de Claude Petit, "Un domaine de l'Aubrac aveyronnais : Le Bournhou" dans Revue du Rouergue, n° 80, 2004, pp. 507-550. Il s'agit d'un domaine acheté au milieu du XVIe siècle aux Canilhac seigneurs d'Aurelle par la famille de Fresals, qui en obtint la haute justice en 1641. En 1679, le domaine fut érigé en communauté distincte d'Aurelle, avec des exemptions d'impôts. Le domaine fut acquis par Couret du Terrail en 1781.

Autre immense seigneurie, celle des Curières de Castelnau, ayant obtenu le titre de baron de Saint-Côme en 1747. A Sainte-Eulalie l'évêque leur cède la haute justice en 1700. Ils aliènent une partie de cette seigneurie, Malescombes, au profit des Aigouy de Coubisou, au cours du XVIIIe siècle. Dans ce cas Malescombes reste dans la communauté de Sainte-Eulalie.

Encore une immense seigneurie, celle des Sévérac, qui borde l'ensemble au sud.

D'autres seigneuries laïques plus modestes, comme celle de Pomayrols ou celle de Saint-Laurens (détenue par M. Valette des Hermaux à la fin du XVIIIe siècle), à laquelle les Ginestes étaient rattachés depuis peu, puisqu'en 1738 le village et son terroir étaient dans la baronnie d'Aurelle.

Côté ecclésiastique, on remarque la présence du Chapitre cathédral de Rodez à Lassouts, de l'évêque de Rodez à Palmas, des religieux cisterciens de Bonneval au Cayrol et à Pierrefiche, mais surtout des religieux d'Aubrac, avec des biens fragmentés et éparpillés, du fait des donations médiévales (cas extrême, la communauté dite de Puech del Fraysse) et des granges monastiques (Galinières et Montbez / Les Bourines, etc.).

Saint-Chély était une co-seigneurie, dont les co-seigneurs s'étaient divisés le territoire en trois parties avec une communauté propre à chacune : Saint-Chély-d'Aubrac dépendait des religieux, Saint-Chély-de-Belvezet était détenue par Baptiste Gabriel Dupac, marquis de Badens comme époux de Catherine d'Aldin de Vennac (acquise des Belvezet en 1658), et Saint-Chély-d'Estaing ou de Cardinet relevait de M. de Méric comte de Vivens, époux de Thérèse de Cardinet (1646), mais son château était à Salecroup, dans la seigneurie des religieux d'Aubrac. Ils y avaient la haute justice et le comte de Vivens les moyenne et basse justices.

Ces territoires sont révélateurs de la complexité des limites religieuses et civiles de la société d'Ancien Régime.

Jean-Yves Bou

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